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Recette de l’Oreiller de la Belle Aurore (pâté en croûte de viandes fines et gibiers)
Recette de l’Oreiller de la Belle Aurore (pâté en croûte de viandes fines et gibiers)
Découvrez la recette traditionnelle de l’Oreiller de la Belle Aurore, chef-d’œuvre d’Antonin Carême mêlant viandes fines, foie gras, truffes et gibiers en croûte feuilletée dorée.
Par Nostre-Dame, voicy ung coussin de chair et de moelle si fin, qu’il vaut festin de roys et ravissement des estomacs délicats ! Sous son dôme d’or, une farce de gibiers à plumes et à poils, de volailles choisies, de morilles ou truffes selon la saison, et de foie gras de canard, promet banquet digne des plus hauts seigneurs. On raconte, en légende, que le sieur Antonin Carême, grand maistre des cuisines et architecte de festins, composa ce chef-d’œuvre pour célébrer la beauté et la grâce de dames illustres, et que sa forme dodue luy valut le nom d’“Oreiller”, rappelant coussin de soye et douceur exquise.
Légende :
On raconte qu’Antonin Carême aurait créé ce pâté pour célébrer la beauté et la grâce d’Aurore Récamier
Voici ce qu’on sait :
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Carême aimait créer des pièces de cuisine très élaborées et symboliques, souvent pour des personnalités de son temps.
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Le nom “Oreiller” pour certains pâtés ou pièces montées vient effectivement de leur forme dodue et moelleuse, rappelant un coussin, ce qui correspond à la description de votre légende.
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Aurore Récamier, célèbre femme du début XIXᵉ siècle, était une figure mondaine et inspirante pour les artistes et gastronomes, mais il n’existe pas de source historique directe qui atteste qu’un pâté “Oreiller” ait été créé spécifiquement pour elle.
Pays / Région :
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Pays : France
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Région : Rhône / Île-de-France
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Inventeur de la recette : Antonin Carême
Marie-Antoine Carême (souvent appelé Antonin Carême, 1784‑1833) est considéré comme l’un des premiers grands chefs de cuisine classique française. Il a codifié et inventé de nombreuses recettes et techniques qui ont structuré la gastronomie française. Parmi ses inventions célèbres : les pièces montées, certaines sauces classiques, et des plats élaborés pour la haute aristocratie et les souverains européens.
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Recette codifiée : Oui (codification historique, non réglementaire)
Cahier des charges historique (Carême) :
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Assemblage de viandes nobles et gibiers en farce fine
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Insertion de foie gras et truffes noires
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Cuisson en croûte feuilletée riche au beurre
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Gelée au Madère ou au Porto
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Présentation en forme d’oreiller
Évolution de la recette :
Au XIXᵉ siècle, l’Oreiller était un plat d’apparat servi chaud sur les buffets aristocratiques.
Au XXᵉ siècle, il s’est transformé en pâté en croûte froid de prestige, puis revisité par des charcutiers d’art.
Aujourd’hui, il est symbole du pâté en croûte gastronomique français, avec des versions plus légères et aromatiques.
Chefs emblématiques et apports :
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Antonin Carême : codification de la recette originelle.
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Arnaud Nicolas : modernisation et équilibre entre gibier et farce fine.
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Gilles Vérot : approche artistique et pâté à texture fondante.
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Yves-Marie Le Bourdonnec : valorisation du terroir et du gibier français.
Historique
Né au tournant des XVIIIᵉ et XIXᵉ siècles, l’Oreiller de la Belle Aurore incarne la quintessence de la gastronomie française et l’art charcutier porté à son plus haut raffinement. Ce mets magistral appartient à la grande famille des pâtés de chasse en croûte, ces œuvres d’orfèvrerie culinaire que l’on servait d’abord chaudes à la cour avant qu’elles ne deviennent les pièces maîtresses des buffets aristocratiques.
Créé vers 1815 par Antonin Carême, le « roi des chefs et chef des rois », ce pâté somptueux rend hommage à Madame Aurore Récamier, amie du célèbre gastronome Brillat-Savarin, et figure emblématique de l’élégance du Premier Empire.
L’appellation « Oreiller » évoque la forme généreuse du pâté, vaste dôme doré, aussi moelleux que somptueux, garni d’un assortiment noble de viandes et de gibiers.
Composé d’une farce fine de volaille et de porc, agrémentée de morceaux entiers de gibiers à poils et à plumes, de foie gras et de truffes, il était traditionnellement préparé en automne ou en hiver, au rythme de la chasse et de la saison des champignons. Chaque maison aristocratique ou bourgeoise en possédait sa propre version, reflet du terroir et du talent du cuisinier.
Au fil du temps, l’Oreiller de la Belle Aurore a évolué du festin royal au chef-d’œuvre charcutier, symbole de virtuosité et de tradition. Aujourd’hui encore, il demeure une référence dans les concours de la Confrérie du Pâté en Croûte d’Exception, célébrant le savoir-faire français, la précision du geste et l’alliance subtile des saveurs de la terre et du gibier.
Descriptif de la recette
Véritable monument de la gastronomie française, l’Oreiller de la Belle Aurore se présente comme un somptueux pâté en croûte feuilleté, doré à l’or fin, renfermant un univers de saveurs où s’unissent terroir et raffinement.
Sa garniture se compose des plus beaux gibiers à plumes et à poils, associés à des volailles fines et à une farce de cochon délicatement parfumée. S’y mêlent, selon la saison, des morilles fraîches (en septembre, octobre et novembre) ou des truffes noires (en janvier), ainsi que de généreux morceaux de foie gras de canard.
Le tout est soigneusement enfermé sous un dôme mordoré, grand comme un oreiller, cuit lentement pour révéler une mosaïque noble et aromatique, à la fois fondante, puissante et délicate.
Traditionnellement, il se sert froid et tranché, accompagné d’une gelée parfumée au Madère qui en sublime les arômes et souligne la richesse de sa farce. Ce chef-d’œuvre culinaire, alliant rigueur technique et inspiration artistique, demeure un hommage vibrant au génie d’Antonin Carême et à l’élégance de la cuisine française d’apparat.
Ingrédients
Garniture traditionnelle (Carême) :
Filets de veau, porc, poularde, canard, pigeon ; morceaux de gibier à poil : lièvre, chevreuil, sanglier selon la saison ; foie gras ; truffes noires ; langue de veau ; ris de veau ; jambon de Bayonne ou de Parme ; lardons (pour liaison) ; farce de volaille fine enrichie d’un appareil à quenelle et de Madère ; pâte feuilletée au beurre
Version moderne (gastronomique revisitée)
Les chefs contemporains (Arnaud Nicolas, Gilles Vérot, Yves-Marie Le Bourdonnec) conservent la structure mais allègent la farce.
Préparation
Rappel des objectifs techniques
Réaliser un pâté en croûte feuilleté (« Oreiller de la Belle Aurore ») comportant :
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une farce fine (appareil à quenelle) émulsionnée,
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inserts/morceaux entiers de viandes et gibier (pièces pochées ou saisies),
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foie gras et truffe en insert,
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cuisson contrôlée au four avec sonde (temp. cœur cible : 85 °C),
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injection de gelée après cuisson et repos pour stabiliser la coupe.
Phase 0 — Approvisionnement & hygiène
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Réception des viandes : contrôler température (< 4 °C), DLC/DLUO, traçabilité.
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Préférer viandes issues de filières qualitatives :
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Veau : veau de lait / Blonde d’Aquitaine ou Limousin pour tendreté.
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Porc : porc fermier (Duroc ou Large White) pour gras et goût.
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Volaille : poulet fermier ou pintade, label « plein air ».
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Gibier : approvisionnement légal, frais (chevreuil, lièvre).
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Foie gras : canard de Barbarie ou canard mulard (origine Sud-Ouest).
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Zones de travail séparées (viande crue / ingrédients cuits), désinfection régulière (chlorure actif ou détergent alimentaire).
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Température de travail idéale : salle froide 6–10 °C pour réduire fonte des graisses.
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Port de gants, charlotte, vêtements propres ; respecter plan HACCP (températures, traçabilité).
Phase 1 — Parage et découpes (détails professionnels)
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Parer chaque pièce : ôter membranes, nerfs, pellicules graisseuses excessives.
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Découpes :
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Inserts / morceaux entiers (pour « visuel » dans la tranche) : dés de 12–18 mm (filets de veau, morceaux de canard, morceaux de gibier).
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Farce (chair) : hacher à 8 mm puis 3–4 mm pour la finesse de la farce ; ou utiliser cutter pour appareil très lisse.
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Foie gras : tailler en cubes de 15–20 mm si insert.
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Champignons : émincer 3–4 mm ou réaliser une duxelles fine.
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Lardons : 8–10 mm si utilisés pour liaison, précuits légèrement pour dégraisser.
Temps estimés : parage + découpes = 40–60 min pour 6–8 personnes (selon organisation).
Phase 2 — Préparations partielles (pré-cuissons des inserts)
But : stabiliser les morceaux entiers (gibier, volailles) afin qu’ils conservent leur forme et goût.
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Saisir / colorer
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Saisir à la poêle très chaude (beurre clarifié + huile) les inserts (veau, porc, volaille, morceaux de gibier) 45–60 s par face pour coloration, pas cuisson totale. Laisser égoutter sur grille.
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Pochage léger (optionnel pour gibier long à cuire)
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Pour gibier ferme (lièvre/chevreuil), pocher 10–15 min dans court-bouillon aromatisé (vinaigre 1 %, vin rouge, bouquet garni) à frémissement pour attendrir. Refroidir immédiatement.
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Dégraissage
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Égoutter, débarrasser l’excès de jus/graisse, conserver jus pour liaison ou réduction.
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Temps estimés : 25–45 min (selon gibier).
Phase 3 — Réalisation de la farce fine (appareil à quenelle / forcemeat)
Objectif : farce émulsionnée, texture lisse et stable après cuisson.
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Hachage
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Passer les chairs (volaille, porc maigre et lard gras si utilisé) au hachoir 8 mm puis 3 mm (ou cutter).
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Assaisonnement
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Ajouter sel (16–18 g/kg de viande selon barème charcutier), poivre, muscade râpée, échalote ciselée confite, cognac/armagnac (10–20 g/kg), crème (10–15 % du poids total), jaune d’œuf éventuel (pour lier).
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Emulsion (cutter ou batteur)
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Si cutter : incorporer corp de graisse (lard demi-sel/panse de porc ou beurre clarifié) en petites parcelles à froid pour obtenir émulsion. Vitesse progressive, contrôle température < 12 °C.
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Si mixeur/mélange manuel : utiliser pâteux mais ne pas chauffer.
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Passage au tamis (finition)
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Pour une farce « très fine » passer au tamis 1–2 mm.
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Contrôle
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Vérifier texture (homogène, non granuleuse). Ajuster assaisonnement.
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Refroidissement
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Mettre en bac au froid (+2/+4 °C) jusqu’au montage.
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Temps estimés : 30–45 min (selon productivité et matériel). Température de la farce pendant opération : < 12 °C pour sécurité et tenue.
Phase 4 — Montage / insertion (technique professionnelle)
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Préparer la pâte
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Étaler pâte feuilletée tourée sur 3–4 mm, laisser point de repos si maison. Garder pâtes au froid.
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Chemiser / foncer (si moule) :
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Option A (moule) : foncer le moule avec pâte, foncer les bords, piquer le fond. Pre-cuire légèrement à blanc 5–8 min si nécessaire.
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Option B (disques) : poser un disque sur plaque, laisser le trou/limite.
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Disposition des inserts
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Déposer une couche de farce (5–8 mm) pour isoler les inserts.
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Positionner les morceaux entiers (insert de veau, canard, gibier) alignés pour un rendu harmonieux à la coupe.
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Glisser cubes de foie gras et lamelles de truffe sur la file centrale.
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Recouvrir avec le reste de farce, lisser (utiliser spatule coudée), laisser 8–10 mm d’espace sous l’élévation du couvercle.
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Fermeture / scellement
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Humidifier bords, appliquer couvercle, sceller, chiqueter ou décorer la surface.
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Percer une cheminée de 10–12 mm au centre (ou plusieurs petites cheminées).
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Dorage
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Dorer 2 couches (dorage initial 1, après repos second dorage pour finition).
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Temps montage : 30–50 min selon habileté.
Phase 5 — Cuisson (contrôle et surveillance)
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But temp. cœur : 85 °C (stade sûr et tenue des protéines ; vérification par sonde).
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Profil conseillé : départ 180 °C convection douce, humidité faible.
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Durée indicatrice : 50–55 min selon format individuel ; 55–65 min pour moule plus grand.
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Sonde : insérer sonde cœur au cœur du pâté (éviter foie gras).
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Coloration : surveiller brunissement ; si trop coloré couvrir de papier alu (ne pas stopper cuisson cœur).
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Repos en chambre froide : sortir à 85 °C, laisser reposer 10–15 min hors four (réduction des sucs) avant mise en cellule froide.
Phase 6 — Refroidissement, gelée et maturation
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Refroidir
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Refroidissement progressif : 15 min à température ambiante, puis placement en cellule froide +3/+4 °C.
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Injection de gelée
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Préparer gelée (fond de gibier réduit + Madère/Porto, gélifiant : feuilles de gélatine 3–4 % ou agar-agar selon usage). Température d’injection : tiède (35–40 °C) pour ne pas diluer la farce.
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Injecter via cheminée et/ou bords avec entonnoir à gelée. Laisser prendre 12–24 h au froid.
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Maturation
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Laisser maturer 24–48 h au froid (+3/+4 °C) pour harmoniser les saveurs ; idéal 48 h pour service gastronomique.
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Stockage
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Conservation : 3–4 °C, emballé — durée 4–7 jours selon ingrédients (foie gras réduit raccourcit durée). Respecter FIFO.
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Phase 7 — Finitions, tranche et service
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Découper à la trancheuse manuelle ou couteau scie (lame chaude ou lubrifiée pour coupe nette). Épaisseur conseillée : 8–12 mm.
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Éliminer éventuelles bavures de pâte ; napper d’un filet de gelée réduite si souhait.
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Dressage : laisser température ambiante 10–15 min avant service si tranché froid.
Charcuterie — Méthodes d’affinage et paramètres (référence)
Pour pièces sèches / jambons / lardons fabriqués en interne :
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Température d’affinage : 10–12 °C.
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Hygrométrie : 70–80 % RH.
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Durée : variable (jambon 6–12 mois, lard 3–6 mois selon produit).
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Contrôles microbiologiques et sécurité alimentaire obligatoires.
(Important : pour utiliser des charcuteries « maison » dans ce pâté, garantir traçabilité, contrôles sanitaires et conformité réglementaire.)
Normes de sécurité (HACCP / BPH)
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Maintenir chaîne du froid : viandes crues < 4 °C, farce et inserts < 12 °C en fabrication.
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Cuisson : cœur 85 °C (sonde).
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Refroidissement : atteindre < 5 °C en moins de 4 heures.
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Étiquetage : ingrédients, allergènes, DLC.
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Nettoyage et désinfection surfaces, plan de maîtrise des CCP.
Programmation / Répartition des temps (résumé indicatif)
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Parage / découpes : 40–60 min
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Pré-cuissons inserts : 25–45 min
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Farce / émulsion : 30–45 min
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Montage : 30–50 min
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Cuisson : 50–65 min (sonde 85 °C)
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Refroidissement + gelée : 12–24 h (prise gelée)
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Maturation : 24–48 h
Versions / Variantes régionales
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Version lyonnaise : accent sur porc, volaille et truffes, sans gibier.
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Version bourguignonne : plus giboyeuse, parfumée au Pinot noir.
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Version moderne concours : en croûte décorée, farce lissée, foie gras central.
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Version de chasse : farce mixte lièvre-chevreuil, gelée corsée au Madère.
Astuces et conseils
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Toujours refroidir la garniture avant montage pour éviter la fonte du beurre.
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Cuire sur plaque perforée pour homogénéiser la coloration.
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Ne jamais forcer la vapeur — la croûte doit rester sèche et croustillante.
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Le chef recommande : laisser maturer 24 h au froid avant dégustation.
Service
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Dressage rustique : tranches épaisses servies sur plat argenté.
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Dressage gastronomique : fine tranche nappée d’un cordon de gelée au Madère, accompagnée d’une salade d’herbes.
Vins et boissons préconisées
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Rouges : Chambolle-Musigny, Pommard, Madiran jeune
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Blancs riches : Meursault, Chassagne-Montrachet
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Spiritueux : Cognac ou Armagnac vieux pour le foie gras
Glossaire
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Appareil à quenelle : mélange fin à base de chair de volaille, blanc d’œuf et crème.
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Pâté en croûte : préparation charcutière en pâte feuilletée, cuite et souvent servie froide.
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Farce fine : chair hachée très finement passée au tamis.
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Duxelles : hachis de champignons sautés au beurre.
L’Oreiller de la Belle Aurore : un monument de la gastronomie française
La véritable recette
Tout le monde s’en réclame, mais peu de versions reflètent réellement l’originale de Carême. La plupart des adaptations commerciales ou familiales ne respectent ni la composition exacte des viandes, ni l’équilibre aromatique minutieusement étudié
Une pièce maîtresse hors norme
Tel un véritable oreiller, l’Oreiller de la Belle Aurore affiche des dimensions impressionnantes : 60 cm sur 60 cm pour un poids d’environ 30 kg. Une telle pièce permet de servir plus de 120 parts de 250 g chacune.
Ce pâté en croûte d’exception, imaginé par Antonin Carême, réunit pas moins de quinze viandes d’élevage et de chasse — certaines provenant de gibiers aujourd’hui protégés. À cette farce somptueuse s’ajoutent foie de volaille, foie gras et truffes, le tout relevé de porto et de vin blanc, pour une alliance de saveurs noble et raffinée.
Chef-d’œuvre d’Antonin Carême
Le pâté se présente sous la forme d’un majestueux carré de pâte feuilletée dorée qui emprisonne les sucs et les arômes. Il peut régaler plus de 120 convives avec des parts généreuses de 250 g.
La farce mélange quinze viandes différentes, issues d’élevage et de chasse — parmi lesquelles figuraient jadis des gibiers aujourd’hui protégés. La composition est enrichie par :
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Foie de volaille
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Foie gras
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Truffes
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Porto et vin blanc pour l’assaisonnement
Anecdote historique
Ce mets somptueux fut créé par le grand Antonin Carême (1784-1833), « le roi des chefs et le chef des rois », en hommage à Madame Récamier, surnommée « la belle Aurore » pour son charme et sa grâce. Selon la tradition, Carême aurait imaginé ce pâté monumental pour un banquet d’exception, afin d’éblouir les convives par sa démesure et son raffinement.
Description gustative
Sous sa croûte dorée et brillante, chaque tranche révèle un marbré de viandes fines et gibiers — faisan, perdreau, chevreuil, veau, canard, lièvre — rehaussés par la rondeur du foie gras, le parfum entêtant de la truffe et la subtile douceur du porto.
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Texture : fondante et ferme
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Arôme : puissant mais jamais lourd
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Bouche : longue et harmonieuse
Servi tiède ou à température ambiante, accompagné d’un Madiran, d’un Pommard ou d’un vieux porto, l’Oreiller de la Belle Aurore incarne l’esprit même de la haute cuisine du XIXᵉ siècle : opulente, codifiée et poétique.
Viandes historiquement utilisées par Carême
Élevage et gibiers
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Veau (noix ou filet)
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Dindonneau
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Poularde de Bresse
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Canard sauvage
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Pigeon ramier
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Faisan
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Perdreau
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Chevreuil
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Lièvre
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Lapin de garenne
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Caille
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Bécasse
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Cygne, paon ou ortolan (rarement, pour décoration ou farce)
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Foies de volaille
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Foie gras de canard ou d’oie
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Truffes noires du Périgord
Espèces aujourd’hui interdites
Espèce | Statut actuel | Motif |
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Cygne | Protégé | Convention de Berne |
Paon | Domestique mais non destiné à la chasse | Jadis élevé comme volaille d’apparat |
Ortolan | Strictement protégé depuis 1999 | Espèce en voie de disparition |
Bécasse des bois | Chasse très limitée | Espèce fragile, quotas régionaux |
Certaines perdrix et cailles sauvages | Interdites localement | Protection des populations naturelles |
Lièvre variable | Chasse réglementée | Espèce protégée dans certaines zones |
Adaptation contemporaine
Pour recréer ce chef-d’œuvre tout en respectant la réglementation et la biodiversité, les chefs remplacent certaines viandes :
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Cygne → poularde ou oie grasse
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Ortolan → caille ou perdreau
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Bécasse → faisan
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Paon → dinde fermière
Ainsi, le plat conserve l’esprit de Carême : une grande farce princière mêlant gibiers et volailles nobles, mais adaptée aux contraintes modernes.
Comparaison historique et contemporaine
Catégorie | Version originale (1830) | Version contemporaine (XXIᵉ s.) | Remarques |
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Pièce principale | Carré 60×60 cm, 30 kg, 120 parts | Taille plus modeste (20-30 cm, 6-10 kg) | Accessible et adaptée au service |
Viandes d’élevage | Veau, dindonneau, poularde, oie, cochon de lait | Veau, poularde, dinde, porc fermier | Traçabilité et labels modernes |
Volailles fines | Canard sauvage, pigeon, faisan, perdrix, caille | Canard mulard, pigeon de ferme, faisan, caille | Respect quotas et élevage contrôlé |
Gibiers à poils | Lièvre, lapin, chevreuil, cerf, sanglier | Lièvre, lapin, chevreuil, sanglier | Gestion cynégétique réglementée |
Espèces rares/interdites | Cygne, paon, ortolan, bécasse, perdrix rouge | Remplacées par caille, faisan, poularde | Protection et réglementation |
Foies/abats | Foies de volaille, foie gras d’oie, ris de veau | Foies de volaille, foie gras de canard, ris de veau | Substitution oie → canard |
Aromates & liqueurs | Porto, vin blanc, cognac, truffes, fines herbes | Porto, vin jaune ou blanc, truffe noire, morilles | Approche équilibrée et harmonieuse |
Pâte | Feuilletée riche en beurre, dorée | Idem, parfois beurre AOP ou graisse d’oie | Maintien du savoir-faire |
Cuisson | Longue, 3-4 h au four doux | Cuisson contrôlée, parfois sous-vide puis finition | Préservation de texture et sécurité |
Service | Tiède, buffets royaux | Tranches, à l’assiette avec gelée au porto | Présentation raffinée moderne |
Analyse historique et symbolique
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L’« Oreiller » rassemble la France entière dans un seul plat : des fermes aux forêts.
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Il reflète le raffinement monarchique, la maîtrise de la pâte, de la farce et des arômes.
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Dédié à Madame Récamier, surnommée “La Belle Aurore”, il rend hommage à la beauté, la lumière et la délicatesse féminine.
Les versions contemporaines conservent cette âme de profusion maîtrisée, un équilibre entre puissance et élégance, terroir et noblesse.